Entreprise à Mission ou Société à Mission ?

Depuis la
promulgation de la loi Pacte, on pourrait s’imaginer que l’expression Société à
Mission allait faire disparaitre l’expression Entreprise à Mission, que tout le
monde utilisait jusqu’alors. Que Nenni ! Beaucoup continuent d’utiliser l’expression
Entreprise à Mission.

Nous allons d’abord proposer une manière de clarifier l’articulation entre le modèle d’entreprise à Mission et la Société à Mission, définie par le droit français, avant d’expliquer pourquoi les deux termes continuent d’être utilisés dans un joyeux méli-mélo.

Qu’est-ce que l’Entreprise à Mission ?

L’Entreprise
à Mission est un modèle d’entreprise est un modèle d’entreprise qui définit dans ses statuts des objectifs
autres que lucratifs, notamment sociaux, environnementaux, d’innovation ou scientifiques
et qui s’appuie sur une gouvernance incluant trois caractéristiques
fondamentales :

  • Une mission d’intérêt collectif (enjeux sociaux, environnementaux, d’innovation,…), constituée d’engagements inscrits dans les statuts
  • Un dispositif de contrôle du respect des engagements et de reddition des comptes qui est l’indispensable contrepartie à la liberté totale laissée à l’entreprise de définir ses engagements.

Ce modèle a notamment été décrit par les chercheurs de l’Ecole des Mines Paristech (Les entreprise à Mission, Kevin Levillain, Vuibert, 2017 )

Qu’est-ce que la Société à Mission ?

La Société à Mission est une qualité que l’entreprise peut désormais
revendiquer en respectant les conditions définies par la loi :

  1. Inscription dans les statuts d’une raison d’être
  2. Inscription dans ls statuts « d’objectifs
    que la société se donne pour mission de poursuivre »
  3. Un organe de gouvernance distinct du conseil d’administration,
    et incluant au moins un salarié ( le Conseil de Mission) et organisme tiers
    extérieur chargés de vérifier le respect de la mission et « l’exécution
    des objectifs »

Autrement dit, l’Entreprise à Mission est un modèle générique,
dont la loi a décrit une modalité de mise en œuvre par la qualité de Société à
Mission. Il est alors possible d’établir la correspondance

Entreprise à Mission Société à Mission
Mission (Somme d’engagement inscrits dans les statuts) Raison d’être et engagements
Dispositif de contrôle par le Comité de Mission Vérification par le Comité de Mission et l’organisme Tiers
Indépendant

Pourquoi certains ne veulent-ils pas
parler de Société à Mission ?

Certains dirigeants parlent de transformer leurs entreprises en Entreprise à Mission sans aller jusqu’à la Société à Mission. L’organisme Tiers Indépendant fait peur à certains dirigeants de PME , qui craignent le retour des Commissaires aux Comptes que la loi Pacte a écartés des PME. Ils craignent aussi que cette évaluation se fasse sur la base de référentiels génériques ne tenant aucun compte de la singularité de chaque entreprise, contre l’esprit de l’entreprise à mission. Ils privilégient le renforcement du rôle du Comité à Mission et à travers lui, l’auto-contrôle de la mission.

Refuser d’aller jusqu’à la Société à Mission risque de décredibiliser les entreprises

On peut rationnellement défendre l’idée qu’une entreprise est une Entreprise à Mission, sans aller jusqu’à la Société à Mission, en faisant référence au modèle générique. Mais refuser la vérification par un organisme extérieur risque d’envoyer un message très négatif sur la crédibilité de l’Entreprise à Mission. Alors que les premières Sociétés à Mission ne verront pas le jour avant 2020, est-ce vraiment le bon message à communiquer ? Il nous semble au contraire qu’il faut tout faire pour crédibiliser ce modèle d’entreprise, en allant jusqu’au bout de la modalité retenue par la loi : la Société à Mission.